Aller vers les autres

Pour notre équilibre psychique, il est indispensable d’avoir une vie sociale. Cette semaine je voulais vous partager une technique, ou plutôt une notion importante, en situation d’épuisement ou de fatigue : Créer et maintenir des liens, des relations, en se tournant vers les autres. Initier des relations.

L’Homme est un être social, il ne peut pas s’épanouir seul. Dès la naissance, il ne peut survivre tout seul. C’est le lien à l’autre qui lui permet d’acquérir une sécurité affective, de pouvoir se développer, et lui permettre de s’individualiser.

La relation, un soutien en situation d’épuisement

Le lien à l’autre est un besoin fondamentale pour l’être humain. Davantage en situation d’épuisement (notamment dans les processus de Burn-out) où l’on peut se retrouver totalement isolé des autres. Se sentir isolé peut être une question de perception, le constat d’une réalité mais également le résultat d’un comportement involontaire. Cet isolement est un facteur favorisant mais aussi un facteur aggravant la situation d’épuisement.

Les relations bienveillantes qui existent autour de vous peuvent être d’un grand secours.

  • un ou des amis sincères vis-à-vis desquels vous pouvez être dans la confidence, vous confier, vous sentir écouter, soutenu de manière inconditionnelle.
  • Un groupe de personnes ou une personne en particulier, avec qui vous entretenez une relation basée sur la convivialité, autour d’un loisir ou d’une activité plaisir, et cette relation nourrit votre besoin d’être en interaction avec d’autres et de partager des moments agréables.
  • Cela peut aussi être des personnes ou une personne que vous rencontrez dans une situation délicate et qui peut jouer le rôle de soutien ponctuel, je parle notamment des groupes de soutien ou des groupes d’entraide, des associations ou bien de professionnels de la santé et de l’aide.

isolement

L’épuisement au travail

Les collègues de travail peuvent, lorsqu’ils sont bienveillants, être des facteurs de protection contre le processus de Burn-Out. En effet en parlant avec eux vous pouvez mettre des mots sur vos émotions, sur les situations que vous traversez et ils peuvent écouter, vous aider à formuler et peut-être proposer d’éventuelles solutions.

Malheureusement, il existe aussi un entourage professionnel ou personnel qui va aggraver la situation d’épuisement :

  • en augmentant les situations de conflit, les sentiments négatifs par des plaintes, du dénigrement, du rejet ;
  • formulant des critiques ;
  • en augmentant la situation de stress par des exigences,…

De ces personnes-là, il est bien entendu que plus vous pouvez vous en éloigner, mieux vous vous porterez !

Quand s’isoler est un mécanisme de défense inconscient

Face à l’épuisement, qui s’installe insidieusement, les êtres humains ont des réactions de défense qui sont naturelles. L’une d’elles se nomme la déshumanisation de la relation. Cette défense consiste à mettre les émotions de côté, la communication avec l’autre devient alors mécanique, notre capacité à être empathique réduite à néant. C’est comme si une épaisse carapace anesthésiait les émotions et les affects que l’on retrouve habituellement dans une relation. Le fait de se couper de l’autre et quelque chose d’inconscient dans cette situation bien entendu.

On fait les choses machinalement, comme un robot, de manière mécanique, avec une certaine froideur.

Adapté l’exercice à votre situation :

Il existe des métiers qui prédisposent à l’épuisement. Les métiers de la relation d’aide et du service, comportent des facteurs d’usure importants. La relation d’aide peut comporter des risques de surcharge émotionnelle. Dans cet exercice je vous demande d’être vigilant sur les choix que vous faites pour vous tourner vers quelqu’un :

Si vous êtes déjà fortement épuisé, attendez de vous remettre et de reprendre vos capacités et votre force intérieure et physique pour vous tourner vers tout type de personnes.

En attendant, choisissez soigneusement celles qui ne seront pas énergivores. Soyez vigilant que ce ne soit pas quelqu’un qui vous demande lui-même du soutien ou de l’aide imminente.

Si vous avez l’impression que le lien à l’autre est déjà insurmontable, même avec des personnes agréables et bienveillantes, c’est que votre épuisement émotionnel est déjà trop avancé et qu’il vous faut alors rapidement consulter un médecin et ou un thérapeute.

On n’a pas tous la même aisance pour aller vers l’autre

Certaines personnes sont très à l’aise pour créer des liens et d’autres auront davantage de difficultés. Notre capacité à créer des liens et à avoir une vie sociale provient souvent du milieu dans lequel on a été élevé, dans lequel on a grandi. En effet bien souvent on réutilise des façons d’être que l’on a connues étant enfant. Nous pouvons être timide, solitaire, avoir quelques difficultés à entrer en contact et ou à maintenir une relation avec l’autre.

amis

Demander de l’aide

Pourquoi se plaindre ?

Pour certaines personnes qui sont en situation de fatigue, la plainte est parfois le seul lien de communication avec l’autre. Nous avons un besoin d’être reconnu et écouté, car si nous ne trouvons pas d’oreilles attentives (professionnels ou de nos proches), la fatigue et ses manifestations ont tendance à se répéter. Elles peuvent se chroniciser, entraîner d’autres troubles, voir même vous pousser à utiliser des moyens inadaptés voir dangereux pour faire face à celle-ci (automédication, alcool, drogue et autres comportements à risque).

Parfois les procédures de plainte auprès des instances judiciaires sont des plaintes premières qui n’ont pas été entendues. Les personnes en souffrance vont les faire entendre par des moyens reconnus par la société. On y retrouve une volonté de reconnaissance du préjudice subi.

Les lecteurs de cet article ont également lu :  Plaisirs de secours.

Être entendu et reconnu nous permet de nous sentir sujet (opposé à la notion d’objet). Se sentir exister, être légitime. Cela limite la détresse et les effets délétères de la fatigue.

Dans les études concernant la souffrance au travail, le manque de liens entre les employés (isolement des employés géographiques ou relationnels) constitue l’un des risques principaux de souffrance. Il amène des personnes à devoir régler seul leur problème, à affronter seul leurs difficultés. Donc la possibilité de s’effondrer augmente.
C’est notamment un élément défendu par le médecin Christophe Dejours, dans son ouvrage « suicide et travail : que faire ? » paru en 2009.

solidaire

Contre les ruminations, une possibilité de distraction

Se tourner vers l’autre c’est également l’occasion de stopper nos ruminations. Couper la boucle de nos pensées désagréables qui polluent nos esprits. C’est avoir la possibilité de se distraire et de fixer notre attention sur autre chose que ce qui nous angoisse, nous accapare, nous épuise.

Avoir besoin de se distraire est très important dans les situations oppressantes, lorsqu’on se sent enfermé et isolé. Il est bon de se créer un réflexe de pensée du type : « je me sens oppressé et enfermé, j’ai besoin de m’aérer d’aller vers l’extérieur ». A ce moment-là vous pourrez vous tourner vers votre entourage (proche physiquement ou par téléphone par SMS). Le but est d’entrer en communication avec quelqu’un d’autre. Quelqu’un de ressourçant, de positif, une personne avec de l’humour est une bonne idée.

Se tourner vers l’autre ce n’est pas forcément attendre quelque chose de l’autre

Dans une relation harmonieuse on reçoit et on donne : par exemple faire preuve de gratitude vis-à-vis d’autrui améliore les relations à l’autre et donc entretient une relation agréable qui sera réciproque. La gratitude c’est pouvoir remercier l’autre lorsque l’on est reconnaissant pour quelque chose, un service ou un bienfait que l’autre nous a procuré. Les gratitudes feront l’objet d’une semaine à venir pour le défi du cordonnier.

La gratitude

Dans son ouvrage « Merci ! Quand la gratitude change nos vies » le psychologue et professeur Robert A. Emmons explique que les résultats de ses recherches expérimentales montre que la gratitude possède au moins un pouvoir temporaire qui améliore la santé émotionnelle, la satisfaction dans les relations et « à certains égards, le bien-être physique ».

Tendresse et gentillesse

Manifester à ses proches de la tendresse amène, sauf cas particuliers, à une manifestation de tendresse en retour.

Manifester de la gentillesse est un très bon moyen de soigner nos relations et elle nous nourrit en retour. Elle épanoui celui qui donne et celui qui reçoit. Être gentil cela peut être :

  • être empathique,
  • se montrer à l’écoute,
  • être patient,
  • être généreux avec l’autre,
  • montrer du respect dans la relation,
  • faire preuve de loyauté,

En fonction de notre fatigue ou de notre épuisement nous sommes plus ou moins enclins à pouvoir proposer ce type d’échange. Il est important d’être indulgent envers vous concernant votre capacité à offrir du temps ou de l’attention à l’autre.

La situation de fatigue et d’épuisement n’est pas une fatalité. Ce que vous n’êtes pas en capacité de donner en ce moment, vous pourrez l’offrir après avoir pris soin de vous. Garder seulement à l’esprit que prendre soin de soi et des autres est un cercle vertueux.

amour

Se tourner vers les autres contre la dépression

L’épuisement émotionnel peut parfois être associé à un état de déprime voir de dépression. Il peut nous amener à penser que nous ne sommes pas dignes d’être aimé, que nos comportements ne sont pas acceptables ou aimables. Cela peut ajouter à notre isolement et également nous amener à nous couper davantage du monde. Notamment si nous ressentons de la culpabilité pour quelque chose que nous avons dit ou que nous avons fait.

Il peut nous arriver de perdre le plaisir que nous avions dans nos relations, notre travail ou dans nos loisirs et les activités qui nous apportaient de la joie. Nos perceptions sont biaisées et centrées sur nos pensées négatives et désagréables.

Ce sentiment d’être vide reflète nos besoins et nos manques. On peut alors avoir tendance à grossir la réalité : se sentir plus isolé que nous ne le sommes réellement, nous sentir rejeté malgré une réalité moins violente.

Ces pensées peuvent être issues du présent ou remonter d’expériences négatives passés (dans l’enfance ou dans les années précédentes) qui nous ont marqués émotionnellement. Le souvenir d’un abandon, la perte de quelque chose ou de quelqu’un, des relations d’emprise ou des maltraitances peuvent augmenter ce sentiment d’exclusion.
Le sentiment d’appartenance à un groupe et le sentiment d’être relié à l’autre est un besoin fondamental. Choisissez des activités qui vous permettent d’être dans ce lien et de ressentir cette appartenance.

La difficulté à demander de l’aide

Pourquoi est-ce qu’il est si difficile parfois d’aller vers l’autre pour demander de l’aide ? Cela dépend parfois de notre confiance en nous, ou de notre état de fatigue et d’épuisement. Certaines personnes peuvent culpabiliser en se sentant un poids pour les autres lorsqu’il demande de l’aide.

Dans ces moment-là vous pouvez visualiser les choses différemment : ne pas demander de l’aide à l’autre sous prétexte que l’on serait un poids pour lui ? cela peut être vécue pour votre proche comme :

  • lui retirer sa capacité à faire des choix (celui de vous aider ou non),
  • C’est lui enlever la possibilité de se sentir utile,
  • Lui hotter l’occasion de manifester son amour ou son amitié,
  • De se responsabiliser

Que ressentez-vous quand vous apprenez sur le tard qu’un ami à vous ou un membre de votre famille a traversé une épreuve sans vous avoir demandé de l’aide ? Il est important de laisser à l’autre la possibilité de dire  « oui » ou « non » lorsque vous avez besoin d’aide. Important de ne pas penser à sa place, c’est de l’énergie gâchée.

Les lecteurs de cet article ont également lu :  Ruminations sur ordonnance.

Les pensées à combattre :

« D’autres personnes ont davantage besoin d’aide que moi ! ». C’est à nouveau un sentiment de culpabilité à l’idée d’obtenir le soutien d’une personne ou une mauvaise habitude de minimiser vos souffrances. Premièrement vous méritez de l’aide autant que quiconque. Deuxièmement votre souffrance doit être prise en considération car on ne peut pas juger nos émotions.

« J’ai peur du rejet ! », « Je ne peux faire confiance à personne d’autre qu’à moi ! » En demandant de l’aide, je peux ressentir de la vulnérabilité et recevoir une réponse négative ou un rejet devient une possibilité insurmontable à envisager. Il est important de mettre à jour ces croyances qui proviennent souvent d’une expérience douloureuse de l’enfance. Ces pensées sont des constructions du monde que l’on se fait (des idées construites pars les expériences vécues) elles ne correspondent pas à la réalité présente.

« Je n’ai pas besoin d’aide, je suis bien plus fort que la plupart des gens ! » Voilà une pensée typique provenant de notre ego. Se reconnaître en situation de difficulté peut être insupportable pour certain : elle reviendrait à dire que l’on n’est pas capable de gérer, de contrôler, notre vie. Là encore c’est une pensée irréaliste que de croire que l’on peut tout gérer et tout contrôler dans notre existence. Nous avons besoin des autres. Nous apprenons des autres et de la relation à l’autre. C’est quelque chose qui nous fait grandir.

demandes

Formuler nos demandes

Allez vers l’autre c’est pouvoir trouver des solutions auxquelles on ne pense pas (trop épuisé pour penser) ou auxquelles on ne peut pas aboutir seul : l’union fait la force !

Apprenons à parler aux autres, à nous exprimer, à transmettre nos désirs et nos besoins aux autres (nos proches familles, amis, collègues,…). Pour être entendu et voir nos souhaits exaucés, il est nécessaire de pouvoir les formuler. Les autres ne lisent pas dans nos pensées. Même s’ils nous connaissent très bien et nous observent, ils ont besoin que l’on formule clairement ce dont on a besoin pour pouvoir y répondre.

En résumé cette semaine : provoquez des rencontres !

Appeler un proche, un ami ou un membre de votre famille qui sait vous soutenir. Renouer le contact avec des personnes que vous n’avez pas vu depuis longtemps par téléphone ou en face à face.

Communiquer verbalement avec quelqu’un, connu ou inconnu, (la boulangère, le facteur ou bien un voisin de table, quelqu’un que vous croisez tous les jours et à qui vous n’avez jamais adressé la parole, …

Internet, les textos, les e-mails c’est uniquement pour le premier pas : lorsqu’on est vraiment isolé et qu’on a la crainte de passer directement au face-à-face. Cela doit rester une étape avant les échanges réels. On a besoin de l’échange sensoriel qui nourrit d’avantage : le son de la voix, les regards, le toucher. Et pensez à l’odeur rassurante du parfum des êtres chers, …

Commencer par participer à un groupe sur Internet, un groupe de soutien ou de parole. Lorsque vous vous sentirez davantage l’énergie et la capacité d’être en relation directe vous pourrez vous rendre dans une association ou un autre regroupement autour d’un sujet qui vous intéresse, du bénévolat, un endroit où vous pouvez transmettre vos connaissances, offrir un peu de temps, apporter une compétence,…
Ce sont de bons moyens de nourrir notre besoin contact mais également de ressentir le plaisir d’être utile à quelqu’un ou à quelque chose, de se connecter à un groupe, se sentir appartenant à quelque chose de plus grand.

Assurez-vous d’avoir chaque jour une interaction verbale, agréable, avec une autre personne.

relation

Quelques pistes pour contacter un proche :

Prendre de ses nouvelles,
Invité à boire un verre,
Inviter à partager une activité,
Invité à manger, essayer ce nouveau resto au coin de la rue et qui vous fait de l’œil !
Partager le repas de midi près de son lieu de travail,
Partir en week-end entre copains,
Souhaiter son anniversaire ou sa fête,
Commémorer un événement triste ou joyeux,
Proposer un peu d’aide, donner un coup de main,
Participer à un événement de la vie d’un de vos proches comme un déménagement, repeindre un mur (c’est plus sympa en papotant tous les deux),
Dépanner un copain (l’aider avec son ordinateur ou autre appareil qu’il ne maîtrise pas et que vous connaissez bien, la rédaction d’un courrier, ou une démarche administrative,…)
Partager une activité de loisir à deux, aller courir, nager,…

Quelques pistes pour rencontrer des personnes :

Un groupe sur Internet lié à un centre d’intérêt,
Des groupes de soutien,
Les sites Internet spécifiques pour rencontrer des amis,
Pratiquer un sport collectif,
Participer à une chorale,
Une association de randonnée,
Allez dans un festival, un concert, une soirée au cinéma,
Une soirée débat concernant une cause particulière,
Inscrivez-vous à un stage,
Visitez d’un lieu historique ou d’un monument,
Une exposition,
Participer à une conférence,
Un atelier de découverte,
Un groupe de parole,
Un groupe de lecture,
Un groupe d’écriture,
bénéficiez d’un cours (poterie, dessin, photo)
Laissez un commentaire sous cet article pour amorcer une discussion … ^^

Merci pour votre attention,

si vous pensez que cet article peut intéresser quelqu’un partagez-le 😉

Ressources: « Merci ! Quand la gratitude change nos vies” le psychologue et professeur Robert A. Emmons; « suicide et travail : que faire ? » Par Christophe Dejours; Plaidoyer pour l’altruisme par Matthieu RICARD

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3 Replies to “Aller vers les autres”

  1. Merci pour ce thème de la semaine ! Rien que prendre conscience des pas déjà effectués au quotidien vers les autres m’a été bénéfique. Je suis réconfortée par la prise de conscience de ces liens. L’idée de poursuivre dans cette direction et les multiplier fait son chemin!

    1. Alicia M dit :

      Bravo GM et merci pour ton partage d’expérience ! C’est également ce que j’ai ressenti de cette semaine. Bravo et bon chemin à toi 😊

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