Les émotions en quelques notions

Le corps qui parle

Une émotion c’est avant tout une réaction physiologique face à une situation. On la remarque, dans notre corps parce qu’on passe d’un état “neutre” à un état de tension. On ressent une différence par rapport à notre état d’origine.

Lorsqu’on apprend une bonne ou une mauvaise nouvelle, on ressent bien notre différence d’état entre le moment qui précède et celui qui suit l’annonce. On a notre rythme cardiaque qui accélère, de la chaleur au niveau du visage ou une sensation de frisson dans le dos. Chaque émotion donne lieu à des manifestations du corps différentes.

Je vous propose un exemple : il est 16h, vous avez encore beaucoup de choses à faire avant la fin de la journée, autant pour le travail qu’à la maison, vous vous rappelez un coup de fil urgent à passer avant 16h. Vous attrapez rapidement votre téléphone mobile, et là … écran noir. Vous pianotez, RIEN ne se passe. Qu’est ce que vous ressentez ? Chaleur dans les joue ? froideur dans les mains ? Vous appuyez sur toutes les touches, rien ! Votre gorge se serre ? Vous soufflez peut être ? … votre respiration se coupe, ou peut être êtes-vous totalement relaxé ? Vous éteignez complètement l’appareil et le rallumez frénétiquement, toujours rien.

Les différentes phases de l’émotion

Dans une émotion, il y a plusieurs étapes:

1. La charge émotionnelle : c’est le moment où l’émotion commence à se manifester. Chaleur dans les joues, froideur dans les extrémités, etc …

2. La tension émotionnelle : lorsque l’émotion existe en nous. Le froid dans les mains vous rend frénétique vous tournez votre téléphone dans tous les sens.

3. La décharge émotionnelle : le moment où la tension s’évacue. Vous soufflez, criez, pleurez ??? Vous verbalisez votre colère/agacement/frustration/crainte … « Il va finir par fonctionner ce ***** téléphone ! »

émotion

Le processus entre le deuxième et le troisième temps peut différer selon l’individu et l’environnement qui est à l’origine de l’émotion : la personne peut laisser l’émotion s’exprimer ou tenter de la taire. Dans le deuxième cas la tension est intériorisée et peut retarder la décharge. Dans le premier, l’émotion est exprimée et cela donne lieu à la décharge émotionnelle.

Dans notre exemple, le processus peut être modifié selon que vous soyez seul à la maison (il sera peut être plus naturel d’exprimer rapidement votre tension sans la brimer: vous hurlez, tapez des pieds), que vous soyez entouré de collègues dans un espace de travail commun (crier ou balancer l’objet à travers la pièce ne sera peut être pas mis à exécution, malgré l’envie), selon votre tempérament (vous êtes peut être un grand Yogi ?), …

Une émotion est courte, elle dure plusieurs secondes ou quelques minutes. Ce que l’on ressent par la suite peut être un sentiment (comme si une partie de l’émotion s’installait) ou encore une émotion parasite (anciennes émotions refoulées qui ressurgissent en dehors du contexte d’origine).

Les pensées de l’émotion

Outre l’état physiologique de l’émotion (sueur froide, rythme cardiaque qui s’accélère, …), le processus émotionnel comporte aussi un état psychologique. Il existe des pensées associées à l’émotion. On ne peut y accéder qu’après la charge émotionnelle.

« J’en étais sûr qu’il fallait que je change de téléphone ! », « Je veux bien utiliser le téléphone de mon collègue mais à quoi bon, le numéro dont j’ai besoin est dans le mien ! », « J’y arriverais jamais, c’est foutu, je suis vraiment bon (bonne) à rien ! », …

Les pensées permettent de maintenir ou d’évacuer l’état émotionnel. Une pensée agréable amènera sûrement un apaisement de la tension et une recherche de solution. Alors qu’une pensée désagréable liée à la situation (actuelle ou passée identique) peut favoriser la durée d’existence de l’émotion.

émotion réaction

La pensée permet de provoquer le cri, le souffle, les pleurs, qui évacuent la charge. C’est aussi la pensée qui nous empêche de lancer le téléphone sur notre voisin ou par la fenêtre de l’appartement.

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Des émotions universelles

Darwin le pressentait et Paul Ekman, psychologue américain, le découvre dans les années 70 à l’université de San Francisco: il y a des expressions faciales communes aux cultures et correspondantes à des émotions universelles: comme la colère, le dégoût, la peur, la joie, la tristesse et la surprise. Ils les nomment émotions primaires.

Peut-être l’avez-vous vu : on peut les observer en regardant un nouveau-né dormir: durant la phase du sommeil dit « agité », le visage du bébé laisse apparaitre les mimiques des émotions de bases.

bébé dort

 

Des centaines d’émotions

La plupart des scientifiques admettent que les centaines d’émotions existantes sont en fait des mélanges, des combinaisons de ces émotions primaires.

Par exemple, le mépris pour être un mélange de dégoût et de colère, l’émerveillement serait un mix entre joie et amour, la déception entre colère et tristesse, etc. Dans l’exemple du téléphone HS, les émotions sont sans doute mêlées de colère, de tristesse, de dégoût, de peur à des niveaux différents selon la nature du coup de fil à passer, votre niveau de fatigue, votre attachement à l’objet ou à la tâche à effectuer.

Et je suis du même avis que Daniel Goleman (rien à voir avec Jean Jacques :D) qui indique qu’il y a tellement de variantes et de nuances d’émotions que nous n’avons certainement “pas assez de mots pour les désigner  toutes » (Cf. “l’intelligence émotionnelle” D. Goleman).

A quoi ça sert une émotion ?

L’émotion est un processus qui nous met en mouvement. Merci l’émotion d’avoir agité mes petits doigts pour pour tenter de rallumer ce ***** téléphone. Et finalement de l’avoir tendu à Tartempion, beaucoup plus zen que moi, pour y arriver ! Enfin !

émotion en latin

 

A nos origines, l’émotion est un processus adaptatif aidant l’Homme à faire face à son environnement et à y survivre. La peur par exemple est notre alliée pour libérer l’énergie nécessaire pour faire face à un danger. Les chanceux n’avaient pas encore de téléphone !

 

Le cerveau est alerté, par ses cinq sens, par un élément de l’environnement. Cela va susciter une alarme et activer le corps pour parvenir à l’action (ou l’inaction selon le stimulus).

peur

 

L’émotion domine le mental

Les sociobiologistes qui étudient le rôle des émotions dans notre évolution ont découvert que celles-ci sont dominantes par rapport au mental et à la raison. On ne peut pas contrôler les joues qui chauffent, le froid dans les mains, les yeux écarquillés, les muscles qui se crispent …

Elles nous préparent à agir, y compris dans les situations trop complexes pour que notre intellect puisse seul s’en sortir.

Les émotions sont inscrites dans notre histoire, notre passé, (personnel, familiale, sociétale). Elles aident à répondre, parfois automatiquement, aux situations déjà rencontrées et plusieurs fois répétées.

Les émotions d’hier et d’aujourd’hui

Chez les enfants ont peut facilement observer que l’émotion incite à l’action. Ils réagissent spontanément, avec intensité. P. Ekman observe que chez les adultes, par contre, on rencontre une modification de cette tendance naturelle. Ils sont capables de couper les émotions de leurs réactions “naturelles”. Comme dans la situation où l’on est entouré de collègues par exemple.

L’utilité de nos émotions d’autrefois est maintenant confrontée à l’évolution de notre société. Cette évolution peut rendre ces mêmes émotions parfois inappropriées au contexte. La peur que le téléphone soit complètement cassé, emportant dans sa tombe nos contacts précieux et notre agenda chéri, se manifeste par la gorge serrée : cela devait, sans doute, être utile pour ne pas se faire repérer par un prédateur, mais cela s’avère bien inutile en face de ce truc en plastique … Non ?

téléphone cabine

Une adaptation a pu se faire en partie, par exemple, la raison intervient plus facilement lorsque la situation émotionnelle est modérée.

Toutefois la réaction émotionnelle domine quand la situation est intense (accident, agression, confrontation à un décès, joie intense, situation hilarante, …)

Un élément du cerveau qui sonne l’alarme

Dans les situations de stress, nos réactions proviennent en partie de l’époque où l’Homme devait pouvoir trouver très rapidement une solution lorsqu’il était, confronté à un danger tel que l’attaque d’une bête sauvage. Il en dépendait de sa survie.

L’émotion de peur ou la colère était alors capable, selon le cas, de nous permettre de courir plus vite qu’Usan Bolt, de grimper à un arbre, nous figer ou encore nous pousser à l’attaque.

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La responsable est une amende …

L’Amygdale, amende en grec, (attention pas celle de la gorge mais celle du cerveau !) est le système d’alarme qui transforme ce que l’on perçoit de la situation, en action. Elle est associée à l’hippocampe (non, pas non plus l’animal marin), autre structure du cerveau, qui mémorise les éléments du contexte pour faciliter nos réactions par la suite. L’amygdale aussi mémorise, mais elle se souvient plutôt des ressentis et émotions qui ont été liées à la situation.

Dans notre exemple, l’Amygdale se souviendrait de l’impuissance à ne pas pouvoir rallumer l’appareil et l’Hippocampe se rappellerait de la pièce dans laquelle on se trouvait, de la sensation que laisse la coque du  téléphone dans notre mains, s’il faisait beau et s’il y avait du bruit dans la pièce, …

cerveau

Ce système est fait de telle manière que le cerveau propose une réaction émotionnelle avant même que tous les facteurs de la situation soient pris en compte (très utile à l’époque des animaux sauvages). Il se base sur les situations déjà rencontrées, fait une rapide reconnaissance, et s’il juge que les similitudes entre passé et présent sont suffisantes, il déclenche l’action. C’est approximatif mais très rapide.

Le modérateur des émotions

Les réactions de ce système d’alarme sont inconscientes et incontrôlables par la raison, au moment où elle se mettent en place. Notre deuxième allié c’est donc le lobe préfrontal gauche qui agit en complément: il est capable de modérer les émotions désagréables. Cependant il n’est pas capable de le faire si l’émotion est trop forte. C’est un ami plutôt nécessaire pour vivre en société.

De nos jours, bien que le stress soit ressenti pour des raisons moins périlleuses pour notre survie à court terme, nos émotions se mobilisent spontanément comme chez nos ancêtres. Pouvoir modérer ma réaction face à l’écran noir du téléphone sera très utile pour m’amener à trouver une alternative. A noter que, si mon téléphone me fait « le coup du black out » trois fois par jour, l’impact sur mon mental sera différent que si cela arrive une fois tous les six mois.

Quel rapport avec l’épuisement ?

Découvrir le processus émotionnel et en connaître les enjeux nous permet de comprendre de quelle manière l’épuisement émotionnel s’installe. Les situations stressantes, l’environnement, les réactions physiologiques et les pensées, mis bout à bout, ont un coût énergétique. Notre façon d’y faire face ou de nous en protéger ont un impact sur notre fatigue du quotidien.

Mieux comprendre notre fonctionnement interne créer un chemin vers nos pistes de solutions. Pour une même situation, il y a une infinité d’éléments sur lesquels on peut agir.

lumière

Imaginons que la situation de notre exemple est anxiogène ou énergivore, on pourrait notamment: changer notre organisation pour ne pas être pris au dépourvu par une panne matériel, prévoir un plan B pour ce type de déconvenue, ou savoir la dépanner, prioriser les éléments important de notre vie pour réduire l’impact de la panne sur notre humeur, changer de téléphone, s’entourer d’un environnement ressource, avoir une technique de relaxation capable de nous apaiser, savoir repérer les émotions et sentiments coûteux et apprendre à décharger la tension de manière optimale, se rendre indépendant de ce type d’appareil, …

Dans les articles de 36 solutions contre l’épuisement nous prenons le temps d’aborder ces différents champs de solutions, en apportant un maximum de sens, d’information et de situations concrètes. Des articles dédiés au processus d’épuisement lui même viendront compléter cette première approche des émotions.

De la même manière qu’il existe une infinité d’émotion, il existe une infinité de façon d’arriver à l’épuisement et encore autant d’en sortir et de l’empêcher.

Merci pour votre attention ! Vous en connaissez un peu plus sur vos émotions !

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Photo par ordre d’apparition : Rodrigo Denúbila, stuart anthony, Casey Eisenreich.
Schémas et dessins: Alicia 36 solutions.

Bibliographie et ressources: « L’intelligence émotionnelle » par Daniel Goleman;

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11 Replies to “Les émotions en quelques notions”

  1. Article très intéressant et très instructif.
    Par contre une remarque par rapport à l’exemple du début de post, j’aurais bien aimé savoir comment la personne allait pouvoir passer son coup de fil ! Quel suspens ! 😜😜😜

  2. On attend les défis dès septembre

  3. Emmanuel dit :

    Article vraiment très intéressant que j’ai dû relire plusieurs fois afin d’en apprécier les différentes informations et solutions contenues.
    Continue !

    1. Alicia M dit :

      Merci Emmanuel ! 😊

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