Un Flow de passions
Je ne sais pas si c’est l’automne, les couleurs des feuilles des arbres, la blancheur des premières neiges, le bruit des gouttes d’eau dans l’herbe, les soirées fraîches où l’on s’emmitoufle dans nos gros pulls douillets … mais depuis quelques jours mes sens sont en éveil. Peut-être est-ce finalement un des effets bénéfiques de ces deux semaines d’exercices de respiration ?
Dans une autre vie, pas si lointaine, je faisais beaucoup d’explorations dans les arts plastiques. C’était mon loisir favori, mon passe-temps, ma passion. Dans ce domaine, tout peut être source d’inspiration. Cette semaine je voudrais vous partager une technique qui a pour objectif de vous relier au plaisir, de combler votre besoin d’accomplissement, d’estime de soi, d’épanouissement personnel,… une technique qui vous rapproche de vous-même et aussi souvent des autres.
Voici comment tout a commencé :
Ma famille et moi recevons un soir de novembre un couple d’amis et leurs deux enfants. Nous discutons à bâtons rompus, du quotidien, de nos histoires respectives, de nos expériences de vie… À un moment de notre discussion, je me rends compte que la jeune femme et moi-même partageons un attrait commun pour les arts plastiques. Elle même en a fait son métier. Je lui explique que cela fait plusieurs années que je souhaitais reprendre des activités créatives, et au détour de l’échange elle sort de son sac un magazine inspirant auquel elle s’est récemment abonnée. Ce magazine papier m’intéresse beaucoup, la couverture est attrayante, la thématique et le contenu semblent effectivement très stimulants.
Ce qui va retenir davantage mon attention, ceux sont les quatre lettres que composent son nom: « Flow ». Savez-vous pourquoi une psychologue relèverait ce titre ? Parce que le terme Flow ou « état psychologique optimal » dans le courant de la psychologie positive définit l’état mental d’une personne qui se trouve dans une absorption totale face à une activité. C’est l’état atteint lorsqu’on y est plongé entièrement : concentré et pleinement engagé. Survient en nous un sentiment profond de satisfaction et d’accomplissement.
Flow et fatigue émotionnelle
Suite à cette soirée et à la découverte du magazine je me suis ré-intéressée à ce concept. Il provient du psychologue Mihály Csikszentmihályi dans les années 70. Étudié jusque dans les années 2000 par plusieurs psychologue, dont Csikszentmihályi, Jackson et Nakamura, il porte notamment sur les domaines du sport, des arts, la musique, l’enseignement, … Son impact sur l’état émotionnel de l’individu est majeur. Mon objectif a donc été de mettre en évidence le lien entre l’état de « Flow » et son impact sur la fatigue émotionnelle.
Comment se sent-on en état de Flow ?
En situation de Flow nos émotions sont contenues, canalisées et coordonnées avec la tâche que nous accomplissons. Il provoque chez nous un sentiment de joie, et les études parlent même d’extase ressentie pendant l’activité.
Les psychologues ont identifié plusieurs aspects qui entourent cette expérience. Pour ces scientifiques, c’est la combinaison de plusieurs de ses aspects qui permettent l’expérience du flow. Certains de ces critères proviennent de l’étude du Flow lors d’expériences sportives :
- Une concentration intense qui est focalisée sur le moment présent,
- La disparition de la distance entre la personne et son activité : ils ne font qu’un,
- Une perte du sentiment de conscience de soi,
- Une sensation de contrôle et de puissance sur l’activité ou sur la situation,
- La distorsion de notre perception du temps,
- Une satisfaction provenant directement de l’activité elle-même. On dit qu’elle est autotélique.
Pour les psychologues qui étudient le concept de Flow, il existe également lors de cet état un sentiment de potentiel réussite et la capacité d’être si passionné par l’activité que nos autres besoins nous semblent négligeables. La situation permet d’acquérir de nouvelles compétences et d’augmenter l’estime de soi.
Le Flow et vous
Peut-être avez-vous déjà ressenti l’état de Flow lors de l’une de vos activités ? Un évènement entre amis autour d’un sport, un moment partagé de musique, une activité de loisir, … ?
Beaucoup de personnes décrivent cet état par une sensation d’être « en état de grâce », ou « comme porter par le courant d’une rivière ». Cette dernière description est d’ailleurs l’origine du terme « Flow ».
Pendant cette activité vous ne ressentez pas d’anxiété ni d’ennui, vous semblez comme hors du temps (vous ne voyez pas le temps passé), vous vous sentez sereins, sans autre préoccupation que ce que vous êtes en train de faire. Vous avez le sentiment d’avoir été pendant ces moments d’activité comme en dehors de la réalité quotidienne.
Vous rappelez vous la dernière fois que vous avez ressenti cette sensation ? Quel était votre activité à ce moment là ? Quels étaient vos ressentis et combien de temps vous semblent-ils avoir duré ?
Pourquoi vous parler du flow dans notre défi du cordonnier ?
Lorsqu’on parle d’épuisement émotionnel, il est intéressant de se pencher sur l’état du flow. Pour ses effets galvanisants et ressourçants mais également parce que, lorsque l’on observe l’activité du cerveau en état de flow, on constate une attention « sans effort », « sans conflit », ni stress. Il n’y a pas d’effort de motivation en état de flow. La motivation se créée d’elle même, naturellement, alors qu’elle est si coûteuse pour nous au quotidien (Rheinberg et Vollmeyer 2001).
Mon objectif d’aujourd’hui sera donc de nous mettre sur la piste du Flow, de vous proposer de nous tourner vers des activités nous permettant de l’atteindre.
Sur la piste du Flow
Quelles peuvent être ces activités ?
Dans les études, l’atteinte du flow se trouve généralement dans les arts, l’enseignement et le sport. Et finalement nous serions en capacité de l’atteindre lorsque nous effectuons une activité passion. J’entends par activité passion une activité qui s’extrait des enjeux d’évaluation et de l’attente de performance vis à vis des autres. Une activité pour son propre plaisir personnel.
Quelles activités vous procurent du plaisir ? Et, si vous êtes déjà en situation de fatigue émotionnelle, quelles activités aviez vous connues avant votre état de fatigue et vous procuraient plaisir et détente ?
Cette semaine nous allons chercher ensemble les activités qui nous procurent ou nous ont procuré le plus de plaisir et de détente afin de les cultiver pour atteindre des expériences de Flow.
Le Flow pour qui ?
L’étude scientifique de 2002 menés par Nakamura et Csikszentmihalyi montre que l’expérience de Flow serait identique quelle que soit l’activité et quel que soit notre âge, notre genre et notre culture. C’est une très bonne nouvelle car cela signifie que nous sommes tous en capacité de l’atteindre puisqu’elle est universelle.
Je me rappelle avoir déjà ressenti une expérience de Flow lors d’un cours collectif durant mes études de systémie à l’Institut Pluridisciplinaire d’Etude sur la Communication (IPEC). C’était un moment de prise de conscience, de compréhension d’un concept que l’on abordait lors d’une mise en pratique. J’ai ressenti à la fois le sentiment de compréhension comme une sorte d’élévation, le sentiment d’appartenance au groupe, comme une impression d’union totale avec les autres stagiaires et la sensation que le temps était comme suspendu.
Avez vous déjà ressenti cela dans des moments d’apprentissage ou de stages ? N’était-ce pas des moments émotionnellement précieux et inoubliables pour vous ?
Retrouvez vos activités ressources
Voici un autre exemple pour vous mettre sur la voie: je vivais également régulièrement des états de Flow lorsque j’avais une vingtaine d’années et que j’étudiais et pratiquais les arts plastiques à l’université. Les moments d’atelier était pour moi comme « en dehors du temps » et je les attendais avec impatience, en espérant retrouver cet état de plénitude et de confort. Je me rappelle l’odeur des salles et du matériel que l’on utilisait, la lumière particulière lors de certaines séances, les sons, …
Avez vous vécu de tels moments ? Ces moments où le regard de l’autre n’a aucune importance et où seule l’activité en elle même existe et importe pour vous ? En activité sportive en équipe, durant un concert, un loisir créatif, une randonnée, …
Cherchez dans votre mémoire ce souvenir qui se détache de la routine quotidienne. Quelle était cette activité ? Étiez-vous seul ou en groupe ? Quelle partie de l’activité était pour vous si particulière et suscitait cet état d’élévation et de plénitude ?
Peut être est-ce une activité que je n’ai pas nommée jusque là, quelque chose que vous aimez ou que vous avez aimé faire ? Quelque chose qui a fait partie de vous et de votre vie ?
Certaines personnes ressentent le Flow, par exemple, lors de séance de méditation ou de respiration de pleine conscience. Le Flow est proche de l’état modifié de conscience qui est recherché lors des séances d’hypnose d’ailleurs.
Pas facile de retrouver nos passions ?
La fatigue émotionnelle peut parfois nous freiner dans nos remémorations. Elle nous fait parfois perdre la notion de ce qui nous apporte du plaisir. Essayez dans les prochains jours de vous mettre à l’écoute de ses souvenirs. Posez la question à vos proches qui ont peut être gardé un souvenir plus clair de vos anciennes activités et qui vous aiderons à retrouver le souvenir de cette activité ressourçante.
Apathie et aboulie
Vous vous rappelez d’une activité plaisir ou d’une passion mais il vous est impossible de ressentir une quelconque envie ou un désir envers celle-ci ?
Peut être êtes vous en situation d’apathie ou d’aboulie ? L’apathie définit l’impossibilité d’une personne à ressentir un intérêt pour une activité par manque d’intérêt émotionnel, manque de désir, par indifférence. Cet état peut être conscient ou non et se manifeste par une absence d’initiative. Les proches peuvent alors nous alerter de cet état lorsqu’ils observent un repli sur soi, un isolement inhabituel.
Dans l’aboulie, à la différence de l’apathie, nous sommes encore sensibles et potentiellement motivés par l’activité et par la projection d’une possible récompense ou d’un bienfait résultant de celle-ci.
L’apathie peut être causée par divers troubles tels que la dépression et l’épuisement psychique. Si vous pensez être dans cette situation la consultation d’un professionnel de santé (médecin puis psychologue ou psychiatre selon votre situation) est nécessaire et dans une certaine urgence.
Mise en pratique
Vous avez trouvé une ou plusieurs activités qui suscitent votre intérêt et vous promettent des moments agréables ?
Cette semaine, ou peut être les suivantes selon vos besoins, vous allez octroyer quelques minutes à cette activité !
Choisissez, en fonction de vos besoins et de vos possibilités, cinq, dix minutes ou davantage de votre journée, une ou plusieurs fois par semaine.
Programmez à l’avance vos séances d’activités et concentrez vous entièrement à celles-ci.
En situation de fatigue émotionnelle il est important de trouver des moments ressourçants. Le repos est une priorité ! Puis viennent ensuite toutes les activités vous permettant de trouver un état émotionnel agréable, positif et apaisant.
Cette semaine j’attends vos retours et vos réflexions concernant la recherche de l’état de Flow.
Pour lire le bilan de la semaine c’est ici.
Retrouvons-nous sur la page Facebook du Blog et n’oubliez pas de vous abonner aux articles pour ne rien rater des prochaines techniques du défi.
Belle semaine à vous !
Cet article m’a permis de mettre des mots sur ce que je ressens quand je fais mon activité »loisir », la musique. C’est vrai qu’il m’est nécessaire pour contrebalancer la fatigue psychologique liée au travail notamment. Merci pour ces analyses qui nous permettent d’y voir plus clair et de comprendre un peu mieux notre fonctionnement psychologique!
Ah oui, c’est un état de grande satisfaction, ça fait plaisir ! Je partage aussi ce plaisir sur mon blog 😉
Je m’octroie quelques soirées comme ça, en tête à tête avec ma machine à coudre : dessiner mon modèle, imaginer ce que mon projet en 2D fera comme patron, pour le réaliser en 3D, mesurer, couper, assembler… Et le réveil de mon portable qui sonne. Je l’ai nommé « va te coucher ! »