Savoir dire non – le bilan

Il est vraiment difficile de dire « non » à une demande ! Difficile quand notre éducation et nos expériences de vie nous ont appris à dire « oui » le plus souvent par politesse ou par crainte. Et d’autant plus compliqué lorsque l’on ne nous a pas appris à savoir comment et pourquoi nous disons « oui » ou « non ». Pour cela il aurait fallu que l’on nous apprennent à nous connecter avec nos besoins.

Toujours difficile de dire NON

D’ailleurs dans ce sens, j’ai reçu plusieurs commentaires de lecteurs, sur Facebook et sur le blog, qui soulignaient la difficulté de dire « non ». Et je rejoins tout à fait ce constat cette semaine j’ai eu l’impression que c’était un réel réflexe contre lequel je tentais de lutter. L’alternative que j’ai trouvée le plus souvent était de différer ma réponse, de demander un temps de réflexion avant de confirmer ou non.

« Je vais regarder mon agenda, je vous tiens au courant », « Vous pouvez m’envoyer votre demande par e-mail ? », « C’est intéressant comme projet ! ça se discute ! », « Super idée de sortie ! Il faut que j’en parle à Tartempion avant de te répondre », …

Toutefois j’ai pu quelques fois dire non en conscience lorsque j’étais suffisamment connecté à mes besoins. Cette expérience demande en effet d’être observateur de nos ressentis et de nos besoins et de pouvoir conscientiser ce ressenti assez rapidement lors d’une interaction.

C’est une réelle gymnastique qui s’acquière et qui demande que l’on s’entraine au préalable dans des situations où il y a peu d’enjeux.

Les craintes

Dans cette même idée, un lecteur m’a expliqué que les conséquences du « non » pouvait être effrayante parfois. Que ce soit dans la vie personnelle ou professionnelle. C’est une réaction qui revient souvent, la crainte, mais la crainte de quoi ? Des représailles ? La perte de quelque chose ? Comme on l’a vu dans l’article d’origine « Semaine 11: savoir dire non », il est important pour y répondre d’analyser ce que nous pensons risquer. Cette analyse nous permet, soit de changer notre décision en ayant conscience des enjeux, soit de modifier notre regard pour répondre à nos besoins. Donc pour ce faire il nous faudra:

– Être au clair avec nos objectifs (ce dont j’ai envie) voir article semaine 10.

– Être au clair avec nos besoins (ce dont j’ai besoin) voir article semaine 8.

De ce fait le lecteur demandait s’il existait des alternatives au « non » telles que les concessions et si ces alternatives pouvaient tenir dans le temps.

Cela m’a rappelé une notion importante du « non » en Communication Non Violente qui éclaire et aide à prendre de la distance.

oui ou non

Le NON en CNV

La Communication Non Violente est un processus pragmatique et efficace élaboré par M. B. Rosenberg. Elle vise le respect de chacun dans la relation à l’autre. Cette communication favorise la coopération et la résolution de conflit.

Pour dire « non » en Communication Non Violente, Marshall B. Rosenberg explique qu’il est important de se mettre en lien avec le besoin de l’autre. Pour lui, il y a toujours un ou plusieurs besoins qui se cachent derrière sa demande. Dans le même temps, pour lui, il est nécessaire de rester en contact avec nos propres besoins.

Il part du principe que lorsque quelqu’un fait une demande, il existe un ou plusieurs besoins qu’il tente de satisfaire.

Notre culture et notre éducation nous ont souvent appris à mettre en place des stratégies pour répondre à nos besoins. Elles nous ont également appris à penser qu’il n’y a que deux possibilités lorsqu’on fait une demande acquiescer ou refuser.

Faire un pas de côté

Pour sortir de la difficulté à devoir trancher entre « oui » et « non » Marshall B. Rosenberg propose de voir les choses différemment :

L’objectif est de co-créer (créer à deux) une solution qui nous permettrait de nourrir nos besoins respectifs.

Pour lui, chacune de nos actions est motivée par deux grands axes interdépendants : les besoins par lesquels je veux prendre soin de moi et les besoins par lesquels je veux prendre soin de l’autre. La CNV propose donc une alternative à cette croyance selon laquelle il n’y a que deux solutions (oui ou non, noir ou blanc, …). Car il existe, en réalité, une infinité de possibilité de réponse. Ainsi on peut, lorsqu’on répond « oui » ou « non », le faire dans la limite de nos propres besoins tout en écoutant et en tenant compte des besoins de l’autre.

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Lorsque j’ai un doute concernant la réponse que je vais faire à une demande, il est important de se poser la question :

Qu’est-ce que je pourrais faire qui prendrait soin de moi tout en restant en lien avec l’autre ?

Notre alternative c’est de pouvoir dire « non » à la demande (sa stratégie) de l’autre tout en disant « oui » à ses besoins.

stop

Prenons un exemple

Maxime demande à Romain de passer la journée de samedi à chercher des pièces autos pour réparer sa voiture avant les vacances. Sa voiture ne fonctionnant pas, il n’est pas mobile, et a besoin de trouver sa pièce rapidement. Romain a une voiture en état de marche. Maxime lui précise « J’ai vraiment besoin de toi ! C’est aujourd’hui ou jamais sinon mes projets de vacances tombent à l’eau, je ne le supporterai pas ! »

Romain est très embêté, il a envie de dire oui à son ami, car il sait à quel point ses vacances vont lui faire du bien. Il craint que Maxime ne craque car il a eu beaucoup d’épreuves à traverser. Pour autant il ne peut pas se résoudre à passer sa journée de samedi avec lui … il doit fêter ce jour là avec sa compagne leur anniversaire de rencontre  …

Ici le besoin de Romain est d’avoir du temps pour sa compagne.

La demande de Maxime est qu’il passe la journée de samedi avec Romain.

Toutefois le besoin de Maxime qui est caché derrière sa demande est d’être rassuré de pouvoir partir en vacances (besoin de sécurité ou de repère).

Ce qui permet à Romain de se relier au besoin de Maxime c’est son besoin de connexion (d’amitié) pour lequel il souhaite rendre service à Maxime.

Romain peut dire non à la demande tout en disant oui au besoin de son ami ! Car, avec ce regard, l’un n’exclut pas l’autre. Nous verrons plus loin concrètement comment Romain pourrait répondre à Maxime.

bras tendu

J’ai le sentiment que ce n’est pas une demande

Souvent on craint qu’il y ait des conséquences ou des représailles lorsque l’on dit non. Si c’était le cas nous ne serions pas face à une demande mais à une exigence, ou plutôt « nous pensons » que c’est une exigence. Or la seule façon de savoir si nous avons à faire à une exigence ou une demande ce n’est pas d’observer l’intensité de la demande mais d’observer la réaction du demandeur face au non que nous lui formulons:

Dans le cas d’une exigence nous recevrions un blâme ou une réprimande de la part de l’autre.

Dans le cas d’une simple demande nous ne serions pas sanctionné.

les exigences ne supportent pas le « non » !

En effet les exigences ne supportent pas le « non ». Savez-vous pourquoi ? Car l’exigence est une stratégie mise en place lorsque le demandeur a peur que ses propres besoins ne soient pas satisfaits.

N’est-ce pas plus agréable de penser les exigences des autres de cette manière-là ? Il me semble qu’elles nous paraissent tout de suite moins effrayantes. Qu’en pensez-vous ?

En cherchant le besoin que le demandeur essaie de satisfaire en formulant son exigence ou sa demande, nous avons là une alternative possible au non catégorique que nous aurions pu formuler.

Nous sommes donc dans cette situation que Marshall Rosenberg propose: de co-construire (construire à deux) une réponse avec le demandeur.

demande

Pourquoi ne pas essayer de convaincre l’autre ?

Que ressentez-vous lorsque l’autre essaie de vous convaincre de faire, ou de penser, quelque chose ?

Il existe une méthode proche de l’approche systémique et de la Communication Non Violente, qui permet d’agir sur nos comportements au moyen du langage afin de développer nos potentiels relationnels (comment optimiser notre sens de la communication). On l’appelle la Programmation Neurolinguistique ou PNL.

En PNL, on apprend qu’il est possible de se positionner de différentes manières en fonction du contexte, de l’objectif et de notre personnalité. En PNL, on part du principe qu’il n’y a pas de mauvaise position mais qu’il peut par contre y avoir des avantages et des inconvénients à celle-ci.

On décrit le risque d’escalade comme étant une situation dans laquelle un enjeu commun qui peut dégénérer en un rapport de force.

Comme si, dans notre exemple, Maxime souhaitait convaincre Romain de son projet sans prêter attention à ses propres projets. Lui demandant par exemple de laisser tomber son anniversaire au risque de perdre son amitié, ou en dévalorisant par exemple la relation entre Romain et sa compagne.

Piqué au vif Romain pourrait argumenter de plus belle sur l’incapacité de Maxime à se débrouiller seul ou à toujours compter sur les autres, … et voici le début de notre escalade.

L’un des deux est persuadé de détenir une certaine vérité et essaie de convaincre l’autre.  Chacun attend ainsi que l’autre capitule ou renonce à son point de vue.

Les effets de l’escalade lors d’une demande

Bien souvent cette façon de faire va avoir l’effet inverse. Cela renforce l’attitude de chaque interlocuteur et aboutira à un blocage, un conflit, et risque d’abîmer la relation.

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Étant tous les deux convaincus de leur point de vue, chacun y ajoute affectivement de l’énergie. Il sera de moins en moins facile de sortir de cette escalade relationnelle.

Chacun peut alors se dire « c’est déjà allé si loin que je ne peux me permettre de revenir en arrière, je dois continuer à défendre ma position coûte que coûte ». Et, à force d’escalader, il est possible d’arriver au point de non retour.

seul

L’escalade relationnelle est donc due à une résistance face à la résistance. Pour pouvoir en sortir:

– Il est important d’essayer de ne pas y entrer.

– Soyez le premier à arrêter cette dynamique d’escalade en adoptant une autre position vis-à-vis de votre interlocuteur.

Plusieurs possibilités s’offrent à vous pour éviter l’escalade :

  • Repérer les intentions positives de votre interlocuteur, qui peuvent parfois se cacher derrière un discours maladroit.
  • Essayer de comprendre et de prendre le point de vue de l’autre.
  • Réfléchir aux conséquences d’une escalade et d’une aggravation de la relation.
  • Dire à l’autre que l’on perçoit dans son discours une volonté de changer notre point de vue.
  • Essayer de trouver un accord, un point commun à vos deux attentes (attitude de la CNV).
  • Adopter ce qu’on appelle en PNL une « position basse » (une attitude qui fait penser à l’autre que l’on est à son écoute ou que l’on pourrait s’exécuter).
  • Vous « synchroniser » avec sa manière de communiquer : vous adapter à son style de communication afin de rester en relation sans pour autant changer de point de vue.

le champ des possibles

Voici donc déjà deux lectures d’une même situation relationnelle où l’on se sentirait « obligé » de dire oui à une demande. Le fait de lire ces situations différemment, en pensant la relation comme un jeu relationnel (PNL) ou en restant attentif aux besoins de l’autre comme au sien (CNV), peut permettre de sortir de l’impasse.

Ces deux regards en PNL et en CNV nous aident à faire un pas de côté, à changer de regard, concernant l’idée que nous avions de la situation. C’est en se décentrant de la sorte que nous trouvons un nouveau champ de possibles. D’une certaine façon dans la relation il y a toujours 36 solutions 😉

Maintenant que votre regard est nouveau, voici concrètement un cheminement CNV permettant d’obtenir un accord « gagnant-gagnant ».

ensemble

Comment dire oui aux besoins de l’autre sans dire oui à sa demande ?

La CNV propose quatre étapes successives permettant de construire ensemble une réponse :

1. Formuler une observation sans jugement de la situation dans laquelle vous vous trouvez.

Romain:  » lorsque tu me demandes de passer le samedi avec toi pour chercher ta pièce je suis embêté … »

2. Se connecter aux besoins de l’autre (différent de sa demande) et dire ce qu’on ressent.

« … car à la fois j’entends que tu as besoin de moi car tu as besoin de pouvoir partir en vacances pour te reposer et c’est important pour moi de t’aider … »

3. Utilisez l’expression « et en même temps » pour dire le besoin auquel je réponds en disant non.

« … ET EN MÊME TEMPS je ne pourrai pas passer le samedi entier avec toi car j’ai besoin de fêter avec ma compagne notre anniversaire de rencontre … »

4. Formuler une demande pour trouver une solution et terminer en posant la question « comment te sens-tu quand je dis ça ? »

 » … j’aimerais qu’on trouve une solution qui nous convienne à tous les deux ? « , « qu’en penses tu ? ». En CNV on finirais par s’assurer que l’autre a bien entendu notre demande de concilier les besoins respectifs: « Comment tu te sens quand je dis ça ? » ou « qu’est ce que tu comprends de ma demande ? »

Mais souvent la formulation en quatre étapes suffit à trouver un terrain d’entente.

Ainsi les solutions peuvent pleuvoir: « Nous irons ensemble le matin et à partir de midi tu iras rejoindre ta compagne », ou Romain prêtera sa voiture pour les vacances de Maxime, ou « je téléphone à un ami qui trouvera ta pièce et nous irons la chercher ensemble », ou « je te prête ma voiture pour que tu fasses le tour des garages », ou « pourrait-on y aller plutôt la veille ? », etc …

Et vous que pensez vous de cette alternative à la communication ? Avez-vous déjà essayé ? Comment vous êtes vous senti ?

J’attends vos retours avec impatience et vous trouverez ci-dessous des références de livres pour approfondir ces techniques.

Belle semaine à tous !

Bibliographie: « L’essentiel de la PNL » par Laurent Bertrel; « Nous arriverons à nous entendre ! » par M. B. Rosenberg; « Les mots sont des fenêtres, ou bien ceux sont des murs » par M. B. Rosenberg.
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